MAD magazine, le célèbre mensuel satirique américain, tire sa révérence après 67 années de parution. Fondé en 1952 il a révolutionné la scène de la BD made in USA, faite jusque là de séries populaires à succès et de Super Héros s’adressant majoritairement à un lectorat non adulte. Mad s’attaquait chaque mois à la culture américaine, aux médias, à la société de consommation, au cinéma et à la télé ainsi qu’aux publicités, symboles de l’American Way of Life. La satire visant plus la société que le monde politique. L’esprit de Mad était très humour juif new yorkais. Mad c’est une galerie de noms célèbres, des géants de la BD, scénaristes et dessinateurs, qui ont révolutionné le genre: Harvey Kurzman, Jack Davis, Will Elder, Mort Drucker, Al Jaffee, Wally Wood, Sergio Aragones, Don Martin,…Goscinny avait d’ailleurs travaillé quelque temps avec eux à New York avant de rejoindre Paris où il finit par diriger Pilote où il créa Astérix avec Uderzo.
J’ai découvert Mad dans un kiosque à journaux de Tel Aviv lors des vacances de l’été 1969. En Belgique j’étais abonné à Pilote et mon libraire liégeois ne vendait pas Mad qui est rapidement devenu une de mes références aux côtés de mes artistes franco-belges préférés. Ce mélange de style a fortement marqué le mien qui était en gestation.
Un peu plus tard j’ai découvert que des artistes de Mad publiaient dans Playboy une bande dessinée satirico-érotique « Little Annie Fanny », ce qui fut pour moi un excellent prétexte pour l’acheter régulièrement. Little Annie Fanny était une bombe sexuelle blonde et naïve, stéréotype classique du cinéma hollywoodien, dont tous les hommes tentaient d’abuser. Une série qui passerait difficilement dans l’ère du #Metoo.
En 1994 en Israel, une version de Mad en hébreu sous la direction de Rutu Modan, est abandonnée au bout de dix mois. La bande dessinée n’étant pas encore suffisamment ancrée dans la culture locale. J’ai eu le plaisir de réaliser la couverture du numéro 1 où j’ai dessiné le héros de Mad, Alfred E.Newman, le rouquin aux dents écartées et aux oreilles décollées, en macho israélien des nineties.
Bye bye Mad!
07/06/2019 par Michel Kichka
bonjour monsieur Kichka,
un point de votre article me dérange énormément : l’hommage à la « culture » du viol à travers Little Anny Fanny. A l’ère du #MeToo comme vous dites, en France, les adolescentes victimes de viol sont dépeintes au mieux comme des naïves, au pire comme des nymphos qui réclament du sexe en termes crus sur les réseaux sociaux… leurs tortionnaires ne risquent plus que la correctionnelle, et font au maximum quelques mois de prison. La terreur et la honte sont encore et toujours réservées aux femmes, même si elles ont le courage de lancer des campagnes comme #MeToo.