La semaine dernière j’ai été invité à parler de la couverture de Riss qui parodie Stromae avec Papaoutai. Une couverture que j’ai défendue car pour moi Charlie est un indice de l’état de santé de la démocratie, cette démocratie si mal comprise et trop facilement mise à mal par un public de plus en plus large qui se lache sans gène sur les réseaux sociaux.
Voir à partir de la 20ème minute.
http://www.i24news.tv/fr/tv/revoir/journal-du-soir/x40toyn#/journal-du-soir/x40toyn
Et revoir ce formidable clip de Stromae!
https://www.youtube.com/watch?v=oiKj0Z_Xnjc
J’étais parfaitement d’accord avec vous, jusqu’à ce que je reçoive ce communiqué du CPCR (collectif des parties civiles pour le Rwanda) qui relaie une lettre ouverte d’Ibuka France, association des rescapés.
Et je n’avais pas vu les choses sous cet angle, mais je pense maintenant qu’ils ont raison.A méditer…
Lettre ouverte à Charlie Hebdo
Au nom de l’Association, Ibuka France, des rescapés et des victimes du génocide des Tutsi, je voudrais exprimer à la rédaction de Charlie Hebdo, l’indignation et l’écœurement que nous avons ressenti en découvrant la couverture du numéro 1236 daté du 30 mars 2016. Le chanteur Stromae y est représenté entouré de membres d’un corps déchiqueté avec, en haut de la page, le titre de sa chanson vedette, « Papa où t’es » ? Cet artiste est discret sur son histoire et ses origines mais personne n’ignore que celles-ci sont rwandaises et qu’elles ont été traversées par le génocide commis contre les Tutsi dans ce pays. A deux semaines exactement de la 22ème commémoration, une mise en scène qui prétend faire rire en superposant de manière macabre l’histoire du génocide et l’épreuve des attentats qui ont endeuillé la Belgique le 22 mars dernier relève de l’indigence morale que de la création humoristique. Elle est une injure à la mémoire des victimes et une honte pour un média qui, il y a un an, lorsqu’il a été attaqué – le mot est faible-, a reçu le soutien du monde entier. La liberté de penser et de créer que nous avons défendue aux côtés des autres et à laquelle nous demeurons attachés, n’autorise pas de rire de tout, y compris des morts et leurs orphelins. L’art ne peut être séparé du beau. Ce qui produit le dégoût et afflige l’innocent est une honteuse perversion du talent par un prétentieux.
A un moment où les rescapés tentent de préparer dans la douleur mais dans la dignité, la journée d’hommage à celles et ceux qui ont été assassinés dans des conditions effroyables, cette couverture est une ignoble provocation.
Nous exigeons qu’elle soit retirée et que de publiques excuses soient exprimées avant le 7 avril prochain.
Marcel Kabanda
Président d’Ibuka France
Contact: contact@ibuka-france.org
Merci pour votre réaction Christine. Je l’ai lue avec beaucoup d’intérêt. Il est très important de faire attention aux « détails ».
1. Stromae est dans le dessin, de couleur beige pâle, les membres qui volent autour de lui sont roses.
2. La chanson originale est PAPAOUTAI, choses que personne n’ignore à commencer par Riss.
3. Le sous-titre est la Belgique déboussolée.
4. Charlie s’est toujours insurgé dans des articles et des dessins grinçants et courageux contre tous les génocides.
Toutes ces indices montrent qu’en dessinant cette couverture Riss n’avait nullement l’intention de se moquer du génocide tutsi ni d’y faire allusion. Il a articulé son travail autour de Stromae, chanteur emblématique de la Belgique, au même titre que d’autres ont pris Tintin, et d’autres encore le manneken pis. Stromae n’est pas la cible du dessin mais est, au contraire, le vecteur par lequel passe la colère de Riss contre l’horreur.
Quant à la lettre de Marcel Kabanda, je peux très bien comprendre, et surtout en tant que juif fils de survivant de la Shoah, que le génocide tutsi qui a été nié pendant de si nombreuses années, que ses victimes qui n’ont pas été reconnues, que ses complices qui n’ont pas été jugés ainsi que ceux qui n’ont rien fait pour l’éviter, donc que tout cela soit une somme insupportable de de fautes historiques graves qui rendent le génocide et ses conséquences plus terribles encore à supporter pour les survivants. Mr Kabanda et ceux au nom desquels il parle a une sensibilité à fleur de peau, à juste titre, et toute allusion au génocide leur est insupportable si elle n’est pas dans la compassion et le deuil.
Il est à noter que la « Fondation Auschwitz » qui a été fondée à Bruxelles par des survivants juifs belges après la Shoah, et dont mon père est membre, est un centre de recherche hautement professionnel qui traite de tous les génocides du XXème siècle: la Shoah, le génocide arménien et le tutsi. Cordialement, Michel Kichka
Bonjour Michel, Très apprécié ton interview sur i 24 news. Amitiés, Guy
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Merci beaucoup Guy, venant de toi ça compte beaucoup pour moi. As-tu une nouvelle adresse mail? Je t’ai écrit plusieurs fois mais ne suis pas sûr que tu aies reçu mes mails! Amitiés, Michel